~ Sous les décombres, Mechtild Borrmann
Trümmerkind, 2017
traduit de l'allemand par Sylvie Roussel
Le Masque, 6 février 2019
Le Livre de Poche, 12 février 2020, 350 p.
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Aussi moche qu'une guerre ? L'après.
Inversion des rôles, vengeance aveugle & désordonnée, lutte pour la survie, deuil...
Ici, dans l'Uckermark en 1945 : avec la débâcle nazie, l'Armée rouge chasse les populations allemandes vers l'ouest. Et c'est violent, cruel.
« Les routes étaient bloquées par des colonnes de réfugiés. Depuis des jours, on entendait le rugissement des orgues de Staline enfler au-dessus des lacs et des collines paisibles et se rapprocher inexorablement. »
Les soldats russes pillent, massacrent, violent ceux qu'ils trouvent sur leur passage.
Dans les campagnes, les propriétaires terriens sont expropriés, leurs biens sont récupérés par les nouveaux vainqueurs (Russes, Anglais).
En ville, des civils périssent sous les bombes, meurent de faim, de froid.
Les rares hommes rescapés rentrent du front ou des camps en triste état, gueules cassées dedans & dehors.
C'est le chaos. Un chaos tel que beaucoup regrettent « l'ordre nazi ».
Tout est contrôlé par les nouveaux occupants ou détruit ; on se débrouille pour se chauffer et se nourrir malgré les pénuries et le rationnement.
J'étais peu attentive pendant les cours d'Histoire de 3e et de Terminale. Mais je crois que cet aspect de la seconde Guerre mondiale (le triste revirement pour la population allemande, les cruautés des 'Alliés' d'alors) n'était pas évoqué, ou vite éludé. Ça m'aurait marquée. De la fin de cette guerre, je ne revois dans mes manuels d'Histoire que la liesse de la France libérée. Même les procès sauvages de l'épuration, je les ai plutôt lus dans des romans, plus tard, que dans mes livres scolaires.
Bref, ce sujet me semble développé depuis peu.
Sur ce thème, lire aussi Le disparu, de Hans-Ulrich Treichel.
Mechtild Borrmann rend très bien compte de cet épisode de l'Histoire allemande, avec finesse et sensibilité. Ce roman a des allures de thriller familial et de jeu de piste. On s'y promène entre deux périodes et trois lieux principaux. On peut s'y perdre un peu, notamment à mi-parcours car les personnages se multiplient et se croisent, forcément.
Mentions spéciales
- au petit Joost, l'enfant 'des débris' ;
- au jeune Hanno qui endosse beaucoup trop tôt le rôle de chef de famille
- à leur formidable maman Agnes.
Ce roman historique est aussi un hommage poignant à toutes les familles séparées à jamais par des guerres, des génocides ou à cause de décisions politiques autoritaristes et folles.
Pensée à tous ceux qui vivent ça en ce moment, à qui les gouvernements refusent un accueil digne sur notre 'terre d'accueil', qui en meurent...
• Pour une fois, la petite phrase sur la première de couverture est inspirante : « Par l'auteur du 'Violoniste', grand prix des lectrices de ELLE Policier. »
Le magazine ELLE, je ne le lis pas. Mais les policiers-thrillers primés par les lectrices de son jury, si.
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29/02 > 03/03