Début des années 70, à Paris. Antoine/Tony, luthier, est sensibilisé à la guerre en Irlande du Nord par un de ses clients musicien. Il se rend à Belfast, est touché, bouleversé même par les événements, et noue au fil de ses séjours récurrents des liens solides, avec deux couples en particulier. Bien au-delà de l'amitié, naissent des sentiments forts, fraternels, filiaux... Mais Antoine et ses proches irlandais apprendront trente ans plus tard avec stupeur et effroi que l'un des leurs est un traître de l'armée républicaine, au service des Britanniques. - Non, je ne dévoile rien, les premières pages sont explicites -
Ce roman est bouleversant, tissé de tristesse, d'incompréhension, de désarroi. Il m'a d'autant plus émue que j'ai récemment entendu l'auteur évoquer avec passion ce récit largement autobiographique et partant, sa douleur. La blessure de Sorj Chalandon reste vive et palpable cinq ans plus tard malgré ce livre "exutoire" (?) - d'où la nécessité pour lui d'en écrire un second (Retour à Killybegs).
Mon traître n'est pas facile à apprécier pleinement si l'on connaît mal le cadre des années 60 en Irlande du Nord - il y est fréquemment fait allusion. Quoi qu'il en soit, sa portée reste universelle : contexte de guerre civile/religieuse/indépendantiste, de conflit armé avec son lot de mort, de deuil, de violence, de lutte... mais aussi de solidarité, d'amour, de dignité humaine. Et tout particulièrement ici une question : celle de l'amitié à l'épreuve de la trahison...
Un grand merci à ceux qui m'ont fait connaître cet auteur et ce livre (Val, Bib), merci à Sorj Chalandon pour sa fougue, l'émotion qu'il transmet lors des rencontres, merci Emmyne pour tes billets enthousiastes, Constance pour tes encouragements !
- - - J'ai relevé beaucoup de passages, vous pouvez aller les voir sur Babelio (pas fini).
Pour info : Sorj Chalandon viendra parler de ses ouvrages à la Librairie Coiffard (Nantes) le jeudi 3/11/2011.
Mon traître, Sorj Chalandon, Le Livre de Poche, août 2009, 216 p.
James Connolly, par qui commence toute l'aventure irlandaise pour Antoine, the Claddagh Ring, Bobby Sands, décédé à 27 ans (en mai 1981) après 66 jours de grève de la faim.
Mon Traître est un roman qui vaut le coup d'être lu pour toutes les raisons que tu évoques dans ta chronique (l'émotion en premier bien sûr, mais aussi la force de l'écriture, le point de vue sur une histoire souvent mal-connue, la portée universelle...). Retour à Killybegs est très différent, tu verras. Le narrateur de Mon Traître devient un personnage secondaire tandis que nous sommes cette fois dans le ventre du traître : pas facile, et en même temps on comprend mieux. et puis on est admiratif devant le courage de Sorj Chalandon qui réussit avec une grande humanité à voir la situation du point de vue inverse, non plus du trahi mais du traître, sans porter de jugement et avec beaucoup de sympathie. enfin bon, je te laisse découvrir tout ça ^^